Bronner (2021) dit ceci: “Pour une séquence de huit coups possibles (aux échecs), on observe un million de milliards de milliards de possibilités. Inutile de préciser que cela excède de loin les capacités de notre cerveau. Or, il ne nous est pas impossible de jouer aux échecs.”
En entreprise, on joue, pour ainsi dire, avec “les échecs” du marché, comme du management. En somme, autant à l’intérieur qu’à l’extérieur, se présentent des monceaux de possibilités, et il faut pouvoir décider d’avancer ses pions, tours et chevaliers, pour protéger son roi ou sa reine à l’occasion. Ce qui est désarmant, par ailleurs, c’est de constater, que la dotation d’une floppée toujours plus impressionnante d’indicateurs de mesure de la performance semble rassurer les dirigeants, au point de les rendre “certains” de leurs prochains coups en termes de choix stratégiques ou managériaux. Or, si l’on peut jouer aux échecs, comme on peut manager une entreprise, rien ne dit que les capacités du cerveau des concernés aura augmenté en proportion du nombre de possibilités de coups à jouer.
Ce qui suggère, qu’au lieu de pontifier, les dirigeants devraient apprendre à revenir sur leurs coups antérieurs, en vue de corriger leur approche au jeu. Ce qui est moins fait, que l’appréciation, et la diffusion, des données de résultat les avantageant le plus auprès des investisseurs et analystes. S’il en était autrement, le modèle de mesure de la performance retenu par ceux-là, du moins chez ceux prétendant “performer” mieux que les autres, ne serait pas tant fondé sur les “fonctionnements” que sur les “dysfonctionnements” de leurs organisations. De fait, ce ne sont pas les résultats positifs à répétition qui feront se démarquer les entreprises de leurs rivales de marché, mais les dispositifs de correction concernant les dysfonctionnements de leur modes, méthodes et pratiques de gestion de l’activité et des affaires.
Les entreprises ne publient jamais, du moins en premier (lisez leurs rapports annuels, surtout la lettre du CEO ou du Chairman), que les données financières les plus favorables à leur image dans le marché. Or, sans qu’il ne soit avisé de faire le contraire, c’est tout de même sur les éléments de dysfonctionnement qu’il leur faudra intervenir, si elles veulent finir par se dépasser elles-mêmes et les autres de surcroît. Ce qui supposerait, qu’au lieu de se congestionner les méninges, avec une tonne d’indicateurs sans effet d’amélioration réelle et directe sur le résultat d’exercice, elles calencheraient sur ce qui les fera progresser en base de concurrence franche par rapport à leur secteur de référence.
Si “moins est plus” en investissement, pourquoi en serait-il autrement en management?