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Signe d’un renversement de valeurs ???

Isabelle Barth a publié le tableau ci-contre (02-11-2022) sur LinkedIn, lequel est tiré d’une étude réalisée par Toluna Corporate Harris Interactive auprès de plus de 10 000 étudiants et jeunes diplômés pour l’Etudiant et EPOKA en 2022. Je ne dispose pas des données de l’étude, et d’ailleurs n’ai pas l’intention de me lancer dans une exégétique de la méthodologie de recherche, convaincu que Harris doit savoir ce qu’elle fait en la matière. Ce que je veux « commenter », c’est l’apparent renversement (complet) de valeurs, chez les « plus jeunes », en matière de premières attentes en milieu du travail.

On a souvent présenté les « plus jeunes » comme étant plus « libres » de leurs choix de travail et plus « soucieux » de leurs préférences d’emploi, par rapport aux « plus âgés ». Et donc, moins dépendants, de ce qui aurait été le principal motif d’emploi de leurs prédécesseurs, en milieu d’entreprise conventionnelle. Les données de cette étude, du moins si on ne porte attention qu’aux chiffres, risquent de nous induire en erreur, par rapport aux raisons qui expliqueraient le classement du « salaire » au-dessus de toute autre considération d’emploi chez « les plus jeunes ».

En période de « reprise économique lente », pour ne pas dire en pré-phase de « récession profonde et durable », il est normal, que l’appréhension du non-revenu, faute de perspectives d’emploi, donne prise à cette remontée spectaculaire des attentes en salaire des futurs « demandeurs d’emploi ».

Or, on ne doit pas oublier, qu’en même temps, et ce depuis près de dix ans, le taux de création d’entreprises sans salarié (notamment en France) a surpassé très nettement celui des entreprises à salariés nouvellement créées. Ce qui est moins une indication de volonté d’assurer un revenu supérieur, que de prendre ses distances par rapport à un milieu d’entreprise s’étant sclérosé à l’os à tous égards en perspectives d’actualisation de soi.

Cela dit, nul n’a prétendu, que la pratique professionnelle en solo ne permettait pas de relever son revenu. Mais, où que ce soit sur la planète, les « jeunes entrepreneurs », qui se multiplient d’ailleurs, optent pour l’autonomie au travail plus que pour l’asservissement de leur talent en milieu d’entreprise arrêtée sur elle-même en termes de valeurs humaines.

Soit le salaire compte. Toutefois, une fois en emploi, la majorité des gens ne quittent pas pour une simple question de salaire (bien qu’il soit indéniable que certains le fassent), mais, plus généralement, pour un contexte du travail plus engageant (culture organisationnelle) et des conditions d’exécution de la tâche plus valorisantes (climat du travail).

Quoi qu’il en soit des motifs personnels de chacun, il semble que l’introduction massive et invasive des technologies de l’information, dans l’ensemble des secteurs de l’activité et des fonctions dans l’entreprise, va justement faire pencher la balance du côté des « entrepreneurs de l’autonomie au travail ». Ceux et celles qui continueront de privilégier l’emploi en structures de salariés, demeureront du type « réfractaire au risque » que semble présenter le travail à son compte dans sa propre entreprise. Or, on peut se demander si le « risque d’emploi » ne sera pas, désormais, plus grand du côté de l’entreprise à salariés que du côté de l’entrepreneur autonome.

Chez vous, les jeunes sont « entrepreneurs », ou « attentistes d’emploi risqué » dans l’entreprise des autres?