Klein, in Matière à contredire (2018), ouvre, en Introduction, avec l’aphorisme de Yogi Berra: “Quand la route te mène à un embranchement, prends-le”. Berra était connu, pour ce genre de paroles à haute teneur d’insignifiance. Du genre: “N’allez plus à ce restaurant, plus personne n’y va. Il y a trop de monde”. Avec ce genre de conseil, on peut tout et rien déduire de ce qu’il n’y a pas lieu de chercher.
Le Texier (2022) a, pour sa part, fait état de nombreuses insipidités que l’on entend de la bouche de pseudos gourous du management, dont les “conseils” sont aussi vagues qu’insipides, si tant est que l’on sache faire la différence entre ce qui vaut d’être déduit des situations et ce qui vaut d’être entrepris pour les résoudre. Nombreux sont ceux qui, sur LinkedIn, se défoncent le crâne, faute de pouvoir agiter leurs synapses, pour produire des semblants de solutions à des problèmes que tant et plus d’experts véritables ont abordé avant eux et résolus plus diligemment, pour ne pas dire plus intelligemment. Mais qu’à cela ne tienne. Ils entendent, encore et toujours, “partager” leur insavoir manifeste, et ce le plus largement possible, histoire d’être lus par plus ineptes qu’eux-mêmes.
Le management, outre qu’il soit un vécu, une expérience, s’explique par le langage qui lui est propre, comme tout autre domaine de l’activité humaine. Le problème, c’est que trop de monde s’imagine savoir en disposer convenablement, à compter de rengaines à la Berra. S’il faut prendre un chemin particulier, encore faudrait-il, arrivé à l’embranchement du choix des solutions possibles aux problèmes du management, savoir quelle direction précisément sera la plus propice à répondre à son besoin de redressement de la situation. Le tout ne consiste pas à prendre conscience des options possibles, mais à savoir exercer son jugement pour donner dans la meilleure voie qui soit. Ce qui ne suggère pas, que la solution retenue ira sans effort additionnel d’attention et de correction, advenant que les choses ne tournent pas comme prévu.
S’engager dans une voie de solution particulière ne signifie pas automatiquement, que les choses vont aboutir très précisément là où on le désirait. L’environnement de l’entreprise n’est pas un tableau figé, mais une “représentation intellectuelle” à la Magritte. Ce que l’on voit n’est pas nécessairement ce que l’on devrait voir, surtout si le paysage nous cache une partie du décor. Or, en management, il est constamment des retournements d’images, qui ont l’heur d’étonner, parce qu’ils viennent distordre, sinon complètement souvent substantiellement, ce que l’on avait cru percevoir du décor devant soi. Ce qu’il importe de savoir, en management, c’est que rien n’est parfaitement figé, dans l’espace ou dans le temps de l’activité et des affaires de l’entreprise. Comme l’a dit Héraclite d’Éphèse, la seule constante est le changement. Et donc, à l’embranchement, il faut parfois revenir en arrière pour prendre… l’autre chemin.
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