Smythe (2016) aborde l’engagement du leader et du personnel, dont il dit qu’il “est mal défini”. Il précise, que la majeure partie des définitions “sont des énoncés à propos de son effet (en termes de résultat sur l’activité) au lieu de porter sur les causes et leurs déclencheurs”. Et l’étude de Gower (2007), suite une enquête pan-britannique sur YouGov de même qu’à la recherche d’Engage for Change, a confirmé. Ce qui donne prise à l’émergence, pire encore à la diffusion, d’une panoplie délirante de mythes sur le concept lui-même. Notamment, comme j’en ai traité hier (voir post: Si l’on comprenait mieux le management), au fait que les gens prennent trop souvent pour acquis, que chacun est devenu un leader parce que, comme tout le monde, “un jour ou l’autre, (il) aura assumé une responsabilité quelconque, dans une quelconque organisation, à l’endroit d’une quelconque ressource, en vue de la mettre, tant bien que mal, en valeur”.
Or, le leadership n’a rien à voir avec la personne, et tout à voir avec les autres. En fait, il a tout à voir avec la personne, en ce que celle-ci doit assumer son rôle, quel qu’il soit d’ailleurs, au mieux de ses connaissances. et surtout en pleine conscience, dans la perspective de l’influence (idéalement positive) qu’elle aura sur les autres. Il ne s’agit donc pas d’un trait de caractère, comme d’un acquis de personnalité, mais de l’effet d’être, d’avoir et d’agir de la personne sur ceux qui seront sujets à son influence. Et si ceux-là estiment recevable et valable la dite influence sur eux, alors ils désigneront la personne visée comme leader. Ainsi donc, nul n’est leader par déclaration, prétention ou estimation de lui-même. Tout part et tout revient vers les autres, ceux qui adhérent aux effets sur eux de l’influence de la personne, et lui reconnaissent un statut de leader.
Le problème, c’est que le terme, “leader”, en anglais, et à sa traîne en français, est presque toujours confondu avec un rang dans l’organisation du travail, une fonction dans la hiérarchie opérationnelle, un rôle dans l’ordre institutionnel d’affectation des mandats d’emploi en entreprise. En fait, si l’on doit pouvoir définir le leadership, c’est qu’on aura, ce faisant, défini le leader, puisque celui-ci exercera le premier. On ne peut, logiquement, imputer d’office le leadership à une personne, sur la base de son rang dans l’entreprise, si elle n’exerce pas ce qu’il suppose, à savoir une influence sur son environnement propre. Et l’influence en question serait mal définie elle-même, en termes d’impact sur l’engagement à la tâche des autres, si elle ne consistait qu’à donner des ordres, justifiés par un rang statutaire dans l’entreprise. L’influence, ici, doit dépasser la simple dévolution du pouvoir administratif dans l’entreprise, et référer au pouvoir d’incitation morale des autres au dépassement d’eux-mêmes par l’exemple de la personne à qui ils attribueront le qualificatif de leader.
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