Smythe (2016) note que “le pouvoir d’auto-organisation explique pourquoi forcer le personnel à s’engager au travail résulte en résistance, voire en colère, ou en sabotage en tout genre.” L’engagement du personnel n’est pas un automatisme d’emploi, parce que la direction, favorisée par sa condition, aime ce qu’elle fait. Il découle de la satisfaction que procure au personnel, pris comme collectif social, le contexte d’emploi, ce qu’il est convenu d’appeler la culture organisationnelle. À quoi, de façon plus rapprochée, et donc plus individuelle, il découle, également, en complément du premier aspect du travail, des conditions générales d’exécution de la tâche.
La satisfaction n’est rien d’autre qu’un état d’esprit résultant du contexte et des conditions en question. Si les modes, méthodes et pratiques de gestion de l’entreprise sont stimulants, alors se trouvera suscité, chez le même personnel, la motivation au travail. Et celle-ci est une disposition à mieux accomplir sa tâche. Finalement, l’engagement, lui-même, qui est une action, et non plus une satisfaction ou une motivation, découle du sentiment de justice sociale et de justice distributive dans l’entreprise, ce qui est imputé au partage constaté, parce que réel, du risque, de l’effort ET des retombées du travail dans l’entreprise. Le flow au travail s’ensuit, pour le personnel, ce qui engendre chez lui l’effet momentané de bonheur en emploi (signalons, que le bonheur n’est pas permanent, mais fluctuant, chez toute personne, parce que sujet aux humeurs suscités par l’environnement changeant qu’elle subit).
L’auto-organisation, en entreprise, permet l’investissement entier de la personne (flow) dans son travail, parce que la confiance en elle, partant en sa capacité de contribution par l’initiative (l’innovation), est rendue possible par l’autonomie qui la rend possible. Sans dévolution réelle du pouvoir de décisions finale sur la tâche, et donc non entravée par les dispositifs de l’exécution ou de l’évaluation du travail, il n’est pas de confiance dans la personne et son talent, parce que l’autonomie en emploi ne le confirmera pas. Or, le personnel a été embauché sur la foi de ses habiletés suffisantes à rendre le travail qui lui a été assigné. Et donc, lui imposer des règles, standards et procédures qui contraignent indûment sa capacité d’exercice libre de son jugement et de son talent, en décidant par lui-même des meilleurs voies et moyens d’accomplir sa tâche au mieux, c’est lui envoyer le signal imparable de non-confiance en son jugement et en son talent.
Force est de constater que, dans la vaste majorité des entreprises, la batterie infernale d’indicateurs de mesure de la performance ne portent pas sur les systèmes de l’organisation, mais sur le rendu de la tâche par les décisions et les actes du personnel. Résultat, le personnel se sent en camisole de force, et réagit comme tout forçat le ferait en situation grandement déplaisante d’état d’être.