Williams (2006) fait allusion au paradoxe de la flèche en vol, énoncé par Zénon d’Élée (490-430 av. J-C,) Suivant celui-ci, à chaque instant, la flèche se trouve à une position précise (en principe différente). Si l’instant est trop court (infiniment court), alors la flèche n’a pas le temps de se déplacer et reste (de ce fait) au repos (donc sans déplacement réel) pendant cet instant. Or, pendant tous les instants suivants, elle va rester immobile, pour la même raison. Si le temps est une succession d’instants, et que chaque instant est un moment où le temps est arrêté, c’est que le temps n’existe pas. La flèche est donc toujours immobile, à chaque instant, et ne peut pas se déplacer: le mouvement est alors impossible. Ce paradoxe a donné prise à de nombreux débats, parmi les philosophes et les mathématiciens, au fil des siècles, ce qui a permis l’émergence des concepts du continuum et de la limite des choses.
En management, les choses se déplacent également. On dit, qu’elles changent, sous l’impulsion des pressions exercées sur l’entreprise qui le pratique par l’environnement (d’abord la demande provenant du marché, puis la réponse à la demande issue de la mise en oeuvre du processus de production du bien ou du service attendu par le marché). Or, il arrive, que l’entreprise gère par procrastination, plutôt que par action décisive, ses fonctions planification et mise en oeuvre de son activité et de ses affaires. En d’autres mots, la flèche de ses interventions est si lente, que son management fait du sur place, pour ne pas dire qu’il régresse sur lui-même. L’entreprise s’illusionne alors sur sa flexibilité, son agilité et son adaptabilité. Et son résultat d’exercice, comme sa performance sur cycle de vie entier, ne lui permet plus de satisfaire l’impératif d’optimisation d’opération que suppose sa mission implicite de création du client.
Ce qui se déplace dans l’entreprise rétrograde, et vers l’arrière de ses capacités, potentialités et opportunités, plutôt que vers l’avant de ses perspectives de développement, ce sont les idées, les concepts et les notions de gestion conséquente de l’activité et des affaires. En somme, l’entreprise se déplace, dans le sens contraire de la logique de l’organisation optimale du rendement sur son être, avoir et agir concurrentiels. Or, la chose n’est pas rare. La courbe de distribution normale indique, en effet, que 91 % des entreprises sont, qu’elles en soient ou non conscientes, rétrogrades. Seules 9 % sont effectivement “performantes”, si tant est que le concept de la performance, comme tant d’autres en matière de management, ne soit pas éculé. “Performer” veut dire faire mieux… que les rivales de marché, puisque la création du client, aux termes de la mission implicite des entreprises, supposera l’avoir fait avant la concurrence.
Chez vous, on “paradoxe” comme Zénon, ou on “manage” comme Élée?