Dans mes 5 livres (voir le sous-onglet Ouvrages), dont la thématique centrale est L’humain au cœur de l’entreprise, j’ai traité à plusieurs reprises du dépassement de soi comme personne (en milieu du travail).
Précisons, que nul ne peut se dépasser en emploi, qui n’a pas d’abord conscience de son état d’être, d’avoir et d’agir, lequel est éminemment dépendant du contexte du travail et des conditions générales d’exécution de la tâche prévalant dans l’entreprise où il œuvre. Or, ces contexte et conditions sont fixés par décision de la direction, le plus souvent sans participation directe et franche de la part du personnel, qui détermine le cadre d’expression d’un chacun dans l’acquittement de l’activité et des affaires que l’entreprise lui confiera. Le problème, c’est que la direction fixe ses règles, normes et standards de rendu d’activité et d’affaires en fonction de résultats financiers, et donc de quantité d’avoir propre, alors que le personnel au travail ajuste ses comportements à la tâche en fonction de facteurs de satisfaction, de vecteurs de motivation et de stimulateurs d’engagement, et donc de qualité d’état propre.
Le dépassement de soi, pour chacun, à cet égard, ne se mesure pas en unités de sortie de système de production (vision mécaniste du management), mais en avancées d’état d’être, d’avoir et d’agir (vision organique du management) imputables au milieu de réalisation que sera pour lui l’entreprise. Et, s’il faut mesurer du rendement sur l’activité et les affaires de l’entreprise, pour qu’elle demeure concurrentielle dans son marché de référence, alors il conviendrait non pas d’adopter des indicateurs de sortie (comptabilité de production) mais d’entrée de système (améliorations des modes, méthodes et pratiques de management).
Se « dépasser au travail », si cela devait être interprété uniquement en plus-value économique pour le personnel, signifiera avoir produit plus que prévu au départ des mandats d’emploi assignés. Mais le « dépassement au travail », comme employé, et le « dépassement de soi », comme personne, font deux. Chacun peut ajouter des unités additionnelles de production à son rendu d’emploi, sans être engagé résolument au travail. Et, comme l’ont explicitement établi Anderson et Anderson (2002), le résultat (la « performance ») à la tâche est le produit des Habiletés techniques multipliées par l’État d’esprit de la personne. C’est donc l’état d’esprit qui est le multiplicateur du rendement sur la tâche, et non pas les habiletés techniques (ce que trop de gens appellent inconsidérément les « compétences »), qui répond du « dépassement au travail » de chacun. Or, le dépassement, compris dans ces termes, renvoie à l’engagement de la personne envers la tâche et envers l’entreprise.
L’engagement de la personne au travail ne dépend pas des objectifs annuels décrétés par la direction, et encore moins des exhortations répétées de celle-ci à plus produire, mais du contexte du travail et des conditions générales d’exécution de la tâche dans l’entreprise. C’est le sentiment de mieux-être personnel, qui stimule la personne au travail, au final de l’exécution des mandats d’emploi en entreprise.
Le « dépassement de soi », en vue de l’accomplissement de son plein potentiel d’être, d’avoir et d’agir, ce que, depuis Maslow, on qualifie d’actualisation de soi, est donc interprétable en termes de condition personnelle de rendement sur ses obligations de tâche en entreprise. En somme, si l’entreprise voulait réellement ajouter de manière optimale à son résultat d’exercice, dans la perspective de la meilleure contribution qui soit à son capital versé, il lui faudrait d’abord évaluer le contexte du travail et les conditions générales d’exécution de la tâche qui subordonnent l’engagement de son personnel au travail. En agissant sur l’un (le contexte) et sur les autres (les conditions), par des améliorations de modes, méthodes et pratiques de management, elle en arriverait à concilier « dépassement de soi » (état d’esprit) et « dépassement au travail » (habiletés techniques), au profit de chacun concerné… son personnel comme elle-même.
Mais cela exigera de l’entreprise deux choses : 1) intelligifier son cadre de référence managérial (gérer du mieux-être réparti dans sa structure du travail); 2) humaniser ses rapports avec toutes ses parties prenantes (gérer des interfaces, interactions et interrelations avec les autres). Autrement dit, pour pouvoir dégager du « dépassement au travail » (en termes optimaux), et ajouter de la sorte de la valeur économique à son activité et à ses affaires, il lui faudra d’abord gérer du « dépassement de soi », à l’avantage de ceux et de celles (son personnel) qui assumeront l’engagement requis pour l’atteinte de ses objectifs de concurrence dans le marché.
Rien ne sert de travailler (d’exiger) plus. Il faut savoir gérer (pourvoir) mieux.