Wittgenstein (1931) conviait à “comprendre et décrire correctement ce qui se passe dans les sciences”. Il remarquait, par ailleurs, que “On entend toujours les mêmes remarques: que la philosophie ne fait à proprement parler aucun progrès, que les mêmes problèmes philosophiques qui occupaient déjà les Grecs nous occupent encore. Mais ceux qui disent cela ne comprennent pas la raison pour laquelle il doit en être ainsi. Or cette raison est que notre langue est demeurée identique à elle-même, et qu’elle nous dévoie toujours vers les mêmes questions. Tant qu’il y aura un verbe ‘être’ qui semblera fonctionner comme fonctionnent ‘manger’ et ‘boire’, tant qu’il y aura les adjectifs ‘identique’, ‘vrai’, ‘faux’, ‘possible’, les hommes viendront toujours heurter à nouveau les mêmes difficultés énigmatiques d’un air fixe ce dont aucune explication ne semble pouvoir venir à bout”.
En entreprise, on bute sur les mêmes questions. Parce qu’on ne comprend pas ni ne décrit correctement les problèmes. Partant, les mêmes écueils de rendement sur l’activité et sur les affaires resurgissent, qui nous font revenir sur les mêmes sujets. On se contraint soi-même, par la langue d’usage à cet égard. Ce qui ne suppose pas qu’on doive redéfinir les mots, chaque fois qu’un dysfonctionnement est noté dans la gestion de l’activité et les affaires. Cela suppose, que l’on pourrait construire, depuis des mots convenus, d’autres idées, en évitant le simplisme des “identique”, “vrai”, “faux” et “possible”, pour aller vers d’autres solutions, par la construction d’idées neuves en matière de modes, méthodes et pratiques de management. Cela permettrait de venir à bout des problèmes usuels, et de passer à des niveaux supérieurs d’organisation du système de service amélioré au marché qu’impose la mission de l’entreprise.
On a tendance, pour faire plus vite (comme si cela était plus économique), à tenir pour “problèmes” les symptômes, au lieu des causes de dysfonctionnement de l’entreprise. Ce qui tient de la mécompréhension du cycle cause-effet-impact, où le “symptôme” est ce qui retient l’attention de l’observateur. En fait, faire moins vite, et plus sagement, ce qui doit être fait, imposerait de comprendre et décrire correctement ce qui explique l’ordre des dysfonctionnements dans l’entreprise, pour trouver des solutions propices au règlement de leurs “causes”. Ce qui n’exigerait pas tant de redéfinir les termes (mots) du management, que de recomposer la langue de celui-ci, par la formulation de concepts, notions et idées autres que conventionnels.
Mais voilà, la course au résultat trimestriel, vite ficelé, qui évite les sorties comptables immédiates, fait oublier que les reports de règlement final des “problèmes” de fonctionnement dans l’entreprise se paient en augmentation de charges d’exploitation sur les exercices suivants. Ce qui demeure “identique”, en management, c’est l’incapacité à se doter d’une langue nouvelle, à compter de “maux” compris et décrits plus correctement.