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Ce que Schumpeter a appelé le « vice ricardien »

Reinert (2004) rappelle que « Schmoller (1872) voulait que la théorie économique soit fondée empiriquement. Alors que la théorie des économistes classiques (Anglais) était, en réalité, fondée sur une série de présomptions, toutes déduites de conclusions osées, et, qui plus est, tirées de thèses abstraites ».

Pour Schmoller, la « méthode déductive des économistes classiques devait être rejetée en bloc, et ce pour trois raisons : 1) ses présomptions étaient nettement irréalistes; 2) fondées sur des abstractions sans lien aucun avec l’économie réelle; 3) et donc sans fondement empirique valable. » Pour lui, la véritable méthode économique devait être « inductive », c’est-à-dire reposer sur des principes d’observation des faits historiques, et donc tirée de la réalité (le concret) des choses, et non pas issue des fabrications mentales d’économistes en mal de prouver leurs thèses personnelles.

Le « vice ricardien », un terme inventé par Schumpeter, renvoie à cette façon qu’ont encore une majorité d’économistes, qui consiste à fabriquer (tirées de nulle part) et à ensuite s’échiner à prouver (démontrer hors de tout doute) des théories (chimères) qui ne s’encombrent aucunement de la réalité des choses (les faits de la vie), pour aboutir en modèles algébriquement élaborés (histoire de mystifier les autres) et généralement inutiles en vue d’applications pratiques (du moins pour le vrai monde).

En quelque sorte, Schumpeter a laissé entendre que David Ricardo (l’un des tous premiers économistes modernes) avait adopté une approche marginaliste de la théorie économique. À compter de laquelle, la « juste réponse », à un « problème singulier », pouvait être fournie en « recourant aux éléments du construit mental » d’un « modéliste de l’idéal », fertile en présomptions de toute sorte et faible en observations de faits réels bien que fort en mathématiques (mécaniques) de démonstration. Au fil du temps, nombre d’économistes, parfois « nobelisés », en sont venus à dépendre de modèles étriqués (d’hypothèses guindées), souvent erronés, et, de ce fait, d’autant plus dommageables par leur diffusion, pour obtenir les résultats qu’ils souhaitaient ardemment en vue de prouver « l’exactitude de leurs plates prétentions ».

En management, et donc en entreprise, on constate, trop souvent, le même genre d’approche éthérée, sans fondement sur la réalité des choses (le vécu du vrai monde), pour en arriver à établir, à l’avantage de leurs auteurs, les résultats qu’ils auront désirés. Ainsi, on prendra pour acquis, que le résultat de l’activité et des affaires dépend au premier chef (sinon uniquement) des actionnaires, des administrateurs et des dirigeants, par investissement, gouvernance et gérance interposés. Or, la fin de l’entreprise, partant l’aboutissement de son activité et de ses affaires, dépend de l’exécution de la tâche qui les assurera. C’est le personnel qui est l’instrument unique de transformation de la ressource engagée dans le service au marché, et, ce faisant, assure l’accomplissement de la fin de l’entreprise, par les moyens qu’il entreprend pour y arriver.

En somme, le personnel résume la fin de l’entreprise comme les moyens de l’activité et des affaires de cette dernière, à lui seul. Ce qui explique, que Porter (1983) ait défini sa fonction comme fondamentale, alors qu’il n’a reconnu aux actionnaires, administrateurs et dirigeants qu’une fonction de support au personnel.

On a là un exemple flagrant de théorie de l’organisation qui ne tient pas compte de la réalité vraie de l’entreprise et de son management, pour ne répondre qu’aux vœux de ceux et de celles qui entendent prendre avantage de leur rang dans l’ordre du pouvoir les concernant, pour asseoir leur domination sur les autres. Non seulement le personnel est-il perdant au bout du compte, mais l’activité et les affaires en sortent amoindries, en ce que leurs capacités, potentialités et opportunités respectives ne sont pas exploitées comme le commande le sens commun de la mission de l’organisation économique qu’est l’entreprise managée de manière optimale. 

Chez vous, en entreprise, on « gère en fonction de théories fondées sur la réalité des choses » ou on « gère en fonction des présomptions et prétentions de ceux et de celles qui tirent avantage de la réalité qu’ils veulent y voir »?