Giovanola (2005) remarque « qu’alors que la pluralité constitutive et la richesse de l’humain ne peuvent être réduites à un seul mode de fonctionnement, la justice au travail impose que l’humain puisse s’épanouir de manière diverse ».
Ce qui suppose une pluralité de tâches, laquelle s’affirmera, non pas par la variété de fin de l’entreprise, mais par la multiplicité des voies et moyens de l’accomplissement de l’activité et des affaires de celle-ci.
La spécificité d’être de chacun, en entreprise, doit pouvoir se valider par l’expression libre des formes de sa contribution à l’activité et aux affaires de celle-ci. Le tout, avec intention de l’inscrire dans la continuité de fonctionnalité de l’entreprise. Parce que l’activité et les affaires, qui, en division du travail, supposent des actes individuellement posés, et donc décidés, doivent s’accomplir dans une perspective d’utilité convenue, et donc unique, d’utilité face au marché à servir ensemble.
Chaque intervenant, sur le flux du travail inhérent à l’activité et aux affaires de l’entreprise, doit avoir la possibilité de se réaliser (s’actualiser) par l’originalité de ses contributions au fonctionnement de celle-ci. Ce qui doit être réalisé en maintenant des « liens de mutualité » (Nussbaum, 1999) bénéfiques au corps d’action, qu’est l’entreprise. Il y a là, pour l’humain, une réponse à son « besoin d’être individuellement » (Marx, 1844), enrichi par l’insertion et par l’identification de soi à un collectif social de son choix.
En entreprise, la « justice au travail » n’est pas que « redistributive », par la compensation des contributions au résultat de l’activité et des affaires, mais également « sociale », par l’autonomie reconnue d’affirmation de la différence de chacun par rapport aux autres.
Soit, « l’humain est un animal social » (Aristote). Mais il est, en lui-même, un être à destin « d’identité propre » (Tardif, 2018). Il dépend des autres, par son contexte et par ses conditions de travail, mais il dépend de lui-même, par les décisions et les actes qu’il pose pour accomplir sa tâche.
En somme, l’humain, en entreprise, s’actualise en affirmant son authenticité par la différenciation de ses voies et moyens de contribution au résultat de l’activité et des affaires, tout en maintenant sa stabilité d’appartenance au corps d’emploi qui est sien par la fin qu’il poursuit avec les autres.
Chacun doit pouvoir s’épanouir individuellement, dans un collectif d’être, d’avoir et d’agir qui le comprenne, pour que « l’entreprise » retienne son sens d’organisation sociale. Et donc, l’entreprise n’est pas un lieu de réduction des personnes à des technicalités de fonctionnement, mais un milieu d’émergence de leurs initiatives, par les voies et moyens de leur affirmation propre dans l’union de la fin d’activité et d’affaires que poursuit cette première.
L’entreprise a mission sociale de mieux-être du client, quoi que son service, lui, soit économique. Ce qui suppose, que l’entreprise doive être à l’interne ce qu’elle doit être à l’externe, c’est-à-dire un vecteur de valeurs humaines.
Et donc l’épanouissement, dont parle Giovanola, doit reposer sur le principe de la continuité d’état de service de l’entreprise, en termes sociaux d’organisation. Autrement dit, son personnel comme son client, qui sont distincts par nature, peuvent être satisfaits par un même service tout en demeurant eux-mêmes différents par leurs comportements et par leurs attentes. On aura là la richesse de l’entreprise, par la pluralité de son utilité à l’humain (personnel et client).
Chez vous, « l’entreprise respecte la multiplicité des besoins d’être différent du personnel et du client », ou « l’entreprise n’a de richesse constitutive avouée qu’en son profit propre »?