Yeoman (2014) cite May (2004) qui dit : « L’expérience du sens est liée au jugement que portent les personnes, en fonction de la valeur qu’elles imputent au but du travail qui réponde à la mesure de leurs attentes propres ».
Même en l’absence d’une autorisation formelle, et à la pièce qui plus est, les buts et l’objet des décisions et des actes demeurent sujets à l’interprétation, à la contestation, à la résistance et à la révision du personnel, ce qui donnera prise à l’émergence d’une atmosphère imparable de politique interne dans le milieu du travail (Milliken, 2013).
En quelque sorte, le personnel tend à donner lui-même du « sens » aux choses de l’entreprise qui le touchent, de près ou de loin. Parce qu’il a un besoin irrépressible de « sens », pour entamer l’action que supposera irrémédiablement sa tâche. En conséquence de quoi, le personnel exercera un jugement sur le travail qui lui sera assigné, en fonction de ce que l’entreprise attendra de lui ET qui répondra à la mesure de ses propres attentes d’implication et de résultat sur l’activité et les affaires de celle-là.
Cela relève du « contrat d’emploi », qui, trop souvent, est interprété par la direction, comme un droit unilatéral d’imposition de contexte du travail et de conditions d’exécution de la tâche au personnel affecté à mandats d’emploi dans l’entreprise.
Holbrook (1977), parlant cette fois de politique inhérente à la gouvernance de la société civile, dira que « les opportunités de satisfaction de l’humain donnent le sens requis à ses décisions et à ses actes ».
Il en sera de même, en milieu du travail, où le personnel jugera du « sens de ses expériences d’emploi » à raison de la valeur d’opportunité de développement individuel que ces dernières lui procureront. Autrement dit, chacun n’agira jamais qu’en fonction de ses intérêts, qu’il s’agisse de la direction ou du personnel dans l’entreprise.
Or, contrairement à ce que trop de dirigeants pensent, et que trop de personnels vivent, en milieu d’emploi, le résultat d’exercice, sur l’activité et les affaires de l’entreprise, ne dépend jamais que de la réconciliation des intérêts entre dirigeants et personnels. Tout ce qui les oppose risquera d’entraîner, à plus ou moins brève échéance, des charges inutiles d’exploitation, et donc à contribuer à atténuer, plus ou moins fortement et plus ou moins durablement, la performance globale de l’entreprise sur son cycle de vie.
Ayn Rand, in La Vertu d’Égoïsme (1973), rappelle que « toute action est motivée par un intérêt propre ». Rien n’est gratuit (There ain’t no such thing as a free lunch). Tout se paye, sous une forme ou sous une autre. Et, en matière d’expérience au travail, tout ce qui n’a pas le « sens » requis pour la satisfaction du personnel, peu importe le discours de conviction de la direction à son égard, aura pour effet de désengager ce dernier à la tâche, jusqu’à rendre l’activité et les affaires de l’entreprise non-concurrentielles.
En somme, ce n’est pas le personnel seul qui fait les frais de la mal gestion du confort moral des employés au travail, mais l’entreprise et ses clients.
Chez vous, en entreprise, la direction se soucie du « sens du travail et de sa gestion » par le personnel, ou elle ne s’intéresse qu’au résultat financier de ses politiques de désintéressement du personnel à la tâche?