Yeoman (2014) cite Frankl qui dit : « La quête du sens est la motivation universelle de l’humain ». Terkel (1975) reconnaissait que « le travail est une quête quotidienne de sens tout autant qu’une source de revenu ». D’ailleurs, Maddi (1970) soulignait que « le besoin fondamental de sens » valait « la peine de vivre ». À quoi répondait Frankl (1984) : « la vie, ultimement, n’a de sens en soi, que si l’on assume la charge (responsabilité) de trouver aux bonnes questions les solutions appropriées ». Et dans la même veine, Martsoff et Mickley (1998) ajoutaient : « tirer du sens de la vie découle de l’objet même de son existence pour l’humain ».
La recherche Kohn-Schooler (1983) a démontré que, en entreprise, les structures sociales peuvent tout autant renforcer que diminuer les habiletés, le statut et le potentiel des chargés de la tâche « en quête de sens dans le travail ». Baumeister (1991) a identifié quatre types de sens recherchés par l’humain : « 1) le sens de l’objet; 2) le sens de l’efficience; 3) le sens de la contribution positive (l’impact sur le résultat); 4) le sens de sa valeur propre, comme personne ». Blustein (2006), pour sa part, avait identifié trois besoins fondamentaux, tous liés au sens du travail : « a) le besoin de survie; b) le besoin d’auto-détermination; c) le besoin de relations ».
En entreprise, le contexte du travail (culture organisationnelle) et les conditions générales d’exécution de la tâche (climat de travail) agissent directement sur l’état d’esprit collectif du personnel. La motivation, qui est une prédisposition individuelle à contribuer plus et mieux au travail, vient plus spécifiquement de modes, méthodes et pratiques de gestion de l’activité et des affaires axés sur l’autonomie, la reconnaissance et l’équité de traitement des personnes. Finalement, le partage du risque, de l’effort et des retombées engendre l’engagement de la personne (soit l’action que suppose l’exécution du travail) à la tâche. L’ensemble forme le triptyque du « sens du travail », dans l’entreprise : Pour la direction et la supervision : i) le sens de la gouvernance de l’activité et des affaires; ii) le sens de la gérance des modes, méthodes et pratiques du travail; Pour le personnel : iii) le sens de l’accomplissement de la tâche.
Le travail « dénué de sens » n’est pas celui inexpliqué au personnel, avant chaque mandat d’emploi, mais celui qu’il ne peut socio-psychologiquement rattacher aisément aux faits de l’entreprise, en termes de fin (mission) et de moyens (utilité) de réponse à la demande du marché. Le personnel a besoin de connaître le « pourquoi » de ce que qu’on lui demande de faire, tout autant que l’impact de ce qu’il aura fait sur l’objet de son travail initial.
En somme, le personnel veut que son travail au du « sens » de bout-en-bout, en termes d’emploi global, et non pas du « sens » au compte-goutte, en termes d’unités immédiates de production. Or, les indicateurs de mesure de la performance, dans la vaste majorité des entreprises, sont centrés sur la seule dimension tâche, sans raccordement de celle-ci avec l’activité ou les affaires qu’elle sert dans l’entreprise.
Le demi-sens, qui découle de tout cela, finit par ressembler étrangement à un non-sens complet! Pas étonnant, que le demi-humain, que cela sert dans l’entreprise-type, soit à demi-engagé à la tâche, pour ne pas dire aux neuf-dixièmes désengagé au travail?
Chez vous, en entreprise, le « sens motive universellement le personnel », ou le personnel est universellement privé du « sens de la motivation par l’entreprise »?